Hier, à la Marche des fiertés de Lille, les cortèges handis et lesbiens ont été laissés à la ramasse. C’est en très petite raison à cause de l’organisation, en très grosse à cause des manifestant.e.s. Et ça montre des vérités sociales dans nos luttes qui sont juste abominables.
Je parlerais principalement du cortège handi car c’est celui dont j’étais réferent.e.s, mais toutes mes pensées vont aux cortèges Lesbien et Anti-capitalistes qui ont grave géré, qui ont été des sucres avec nous et qui vraiment ont été trop chouettes. Merci énormément <3
13h30, la place de la République commence à bien se remplir. Aux alentours de 14h, les prises de parole commencent. Déjà à ce moment là, un groupe se forme, et met de la musique à fond à a peine 50 mètres de nous. Sans masques, bien-sur. Je précise « sans masque » car il faut comprendre deux choses : – On a des obligations à la Préfecture. Si y a des problèmes pendant la manif, c’est sur nous que ça tombe. Hors le port du maque est obligatoire et était un de nos arguments pour avoir droit de faire cette manif. – Il y avait 2 cortèges handis. Pour plusieurs d’entre nous, on a pas pu manifester ou faire de l’associatif pendant plus d’un an, car a risque face au covid. Ne pas porter le masque, c’était risquer de mettre nos vies en danger, littéralement. Et donc c’est du validisme.
Donc, sans grande surprise les valides fêtard.e.s en ont rien à foutre – de notre santé – de nos prises de paroles – de nos responsabilités
Mais bon, on à l’habitude, j’ai envie de dire.
S’en suit le départ de la manif. On appelle les cortèges à se positionner, mais là encore, rien a foutre et tout le monde à foncé. Les cortèges n’ont ni eu la place ni le temps de se former. A savoir que de base, voilà l’ordre de passage prévu : – Banderole unitaire des organisateur·ice·s – Cortège non-mixité racisée – Cortège Handi (Handimouv) – Cortège non-mixte lesbien – Cortège Handi (Handivergence) – Les gens sans cortège – Cortège Anti-capitaliste
Donc j’étais référent·e pour le cortège Handivergence, soit le dernier cortège de tête. On s’est faufilé·e·s tant bien que mal derrière la banderole unitaire au départ, en nous faisant piétiner ou couper la route. On était avec des fauteuils roulants, des cannes, des béquilles, des chiens d’assistance. Je sais pas si vous vous rendez compte du danger que c’est d’être dans un attroupement serré à ce moment là. Pendant toute la manif, on à dû gérer les gens qui passaient entre/devant nos fauteuils etc, les gens qui bousculaient sur les côtés…. Le service d’ordre savait plus où donner de la tête (pareil ils ont assuré à fond, merci les camarades ). Malheureusement, c’est un fait, il n’y avait pas assez de monde au Service d’Ordre pour réussir à nous aider en continu. On a passé notre manif à nous épuiser à demander aux gens de dégager.
Je précise aussi que notre présence était prévue dès le départ, annoncée sur les réseaux sociaux etc, et on était dans l’organisation, sans déconner avec Handivergence on a dû organiser genre le quart voir le tiers de la manif. C’est énorme.
Puis tout du long de la manif, tout le monde nous a doublé sur les côtés. On allait pourtant au rythme de la marche, on était pas à la traine, mais bon les valides sont pressés dans leur vie.
Ce qui devait arriver arrivera. On a débuté en tête de cortège à Répu, on a terminé fin de cortège à Wazemmes. En 2 km, plus de 5 000 personnes nous ont dépassés dans le plus grand des calmes. Est ce que vous vous rendez compte à quel point c’est dangereux de laisser des personnes en situation de handicap JUSTE DEVANT DES FLICS ?? On l’a dit pendant notre discours, mais aux EU en 2020, la moitié des personnes mortes tuées par des flics c’était des personnes handies. C’est vraiment comme ça que vous luttez ? En nous exposant au danger ?
C’est à ce moment là que nos camarades lesbiennes et anti-capitalistes ont assuré, iels se sont mis·es entre les flics et nous pour faire tampon en cas de violences policières et qu’on ai le temps de s’isoler de la manif. Genre une 50 aine de personnes ont pris cette décision de se mettre en danger pour qu’on puisse gérer, parce que les 4 950 autres s’étaient barrés à l’avant prcq y avait de la musique Idem, on devait se positionner assez loin des fanfares et sono pour les personnes hyper-sensibles. Les gens sont venus avec leurs enceintes portatives parce qu’iels songeaient même à notre possible présence et nos besoins. Les fanfares et autres devaient se signaler avec à l’organisation, résultat on s’est retrouvé·e·s avec un Batucada juste derrière, à qui on a dû demander de reculer jsp combien de fois.
On est arrivé·e·s place Casquette, j’ai pris le micro pour dénoncer tout ça. Pour rappeler que Marsha P. Johnson, dont on parle si souvent, était concerné·e par les luttes anti-validistes, et qu’on en parlait jamais.
Sans les femmes trans, racisé·e·s, TDS et handies, on serait pas là aujourd’hui.
Pourtant, ce sont les plus oubliées de nos luttes.
Quand je disais au début de ce post que la situation était très représentative, voilà ce que je voulais dire :
– quand vous vous êtes préparé·e·s à la Marche, quand vous avez participé, vous n’avez probablement même pas songé que des personnes handies pourraient y être. – quand vous étiez en train de nous piétiner, vous ne vous rendiez toujours pas compte qu’on était là.
Parce que vous nous oubliez en permanence, vous ne faites rien pour rendre accessible vos et nos luttes parce que pour vous on existe pas. Nous, en un mois, on a pensé à tout. Parce que c’était pas infaisable de préparer de l’inclusivité. Par contre c’est infaisable de se faire respecter quand on est minoritaires en société. Et en temps que personnes LGBTI+, vous auriez dû vous en rendre compte.
Vous nous laissez toujours derrière. Vous nous oubliez en permanence. Et là c’est plusieurs milliers de personnes qui nous ont oubliés. Qui nous ont laissés derrière. Parce que socialement, c’est toujours comme ça quand on est handis. On existe pour personne.
Beaucoup d’entre vous sont ressorti·e·s de cette Marche très fier·e·s et heureux·es. En temps que co-organisateur·ice je trouve ça super cool. En temps qu’oublié·e des luttes, cette manif m’a épuisé·e et foutu un gros coup au moral.
D’un point de vu personnel, ça va faire bien 5 ans que je lutte activement pour ma propre inclusion (sinon personne ne le fait), et je m’épuise. On a d’aide de vraiment pas grand monde. Et s’en est encore la preuve.
Je sais pas comment finir ce post, si ce n’est qu’en vous disant que svp, pensez un peu à nous. Arrêtez de nous oublier. La prochaine fois que vous allez à un évènement, demandez vous si c’est inclusif, si c’est safe pour les personnes handies. On est vraiment plein plein plein à être concerné·e·s. Pour rappel, une personne sur 5 est en situation de handicap. Ca veut dire qu’hier, on était probablement plus de 1 000 concerné·e·s. Et c’est pas lutter pour les droits LGBTQIA+ que de nous oublier systématiquement.
Encore un grand merci aux camarades de l’organisation qui nous ont grave soutenu·e·s, qui ont essayé de prendre des initiatives. Merci au Service d’Ordre qui a fait un taff incroyable, et encore une fois aux camardes lesbiennes et anti-capitaliste qui ont grave assuré <3
Je suis grave en colère et triste, mais je sais que les mauvaises expérience existent pour qu’on en tire des leçons. Juste, ça fait longtemps qu’on nous oublie, et on se fatigue. Maintenant il faut que vous preniez le relais encore + si vous êtes pas handis